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Brune : au commencement je suis venue proposer à Nina de lui faire son portrait photographique : comme un face à face : moi et la caméra, elle dans le lieu de son choix.

La consigne est de mettre en place une séance* pendant 60 minutes. La première étape dure 45 minutes avec des prises de vues toutes les 2 minutes pour revenir pendant 15 mn à l'image de départ.

Le But : Mettre en scène une personne tout empreints de son contexte social, le portrait devient traque de l'individu, cadré au plus près, jusqu'à ce que son visage, voilé, déformé, disparaisse presque.

« Séance : Temps pendant lequel la personne se soumet, se livre, de façon continue à une activité mit en place autour d’une discussion entre deux personnes. Pendant lequel « la personne : le sujet » pose sans interruption comme dans un temps que l’on consacre à une activité quelconque. »

(Extrait de la définition du Robert).

Portrait = Séance

Portrait = séance 1 / 12 décembre 2012

Première rencontre avec Nina. Pour la première image, je lui ai demandé de se mettre dans une neutralité parfaite d'une photo d'identité. Frontalité, yeux grand ouverts face à l'objectif, cou largement découvert : la tête s'offre dans sa plus grande nudité. La lumière qui baigne cette face par le côté la révèle sans la dramatiser. Et l'ombre qui partage le visage n'y fait que déployer le relief. Identifier / connaître : la question de l'identification - classement et contrôle social - qui occupe la première production de portraits. La photographie - associée au nom.

Portrait = séance 2 / 28 décembre 2012

Nos rôles s'échanges, Nina derrière l'appareil photo, moi dans le rôle de Nina. Nous constatons dans l'application que nous appréhendons la séance différemment. Nina décide de sortir des prises de vue toutes les deux minutes afin de choisir ses compositions. Dans l'application je suis très minutieuse dans le découpage du papier collant. Toute la partie de la fin après les quarante-cinq minutes, au moment d'enlever les couches : cette partie devient extrêmement dramatique par l'action directe des cheveux prient dans le plastique collant. Il y a comme une forme ironique, voire burlesque, qui semble renverser les perceptions : celles du théâtre - la face peine à recueillir la vérité du sujet ou offre un accès authentique, primitive et hurlant ou dans ce moment on trahit l'affolement du portrait qui quitte ainsi l'axe. On peut observer que c’est surtout au niveau de la bouche qu’il y a expressivité. Comme une régression, Georges Bataille la commente comme le retour de l'animalité : "Dans les grandes occasions, la vie humaine se concentre encore bestialement dans la bouche... La terreur et la souffrance atroce font de la bouche l'organe de cris déchirants. Il est facile d'observer à ce sujet que l'individu bouleversé relève la tête en tendant le cou frénétiquement, en sorte que la bouche vient se placer dans le prolongement de la colonne vertébrale, c'est-à-dire dans la position qu'elle occupe normalement dans la constitution animale."

Portrait = séance 3 / 15 janvier 2013

Oublier le visage, échapper à l'évidence du visage. « La désacralisation du visage humain est la prochaine piste de travail que nous nous fixons. Plus visible désormais, dans la chair, comme une face inaccessible du divin. Le visage de la créature - visage support - visage source pour produire un envoûtement. » Avant la séance, je propose à Nina le dispositif du studio photo avec la projection en temps réel des photos. (voir schéma dispositif). Aussi Juste avant cette séance j’apporte le livre d'un peintre chinois Zao wo ki, l'idée était de proposer à Nina d’ouvrir un nouvel espace, celui de l’abstraction avec la matière. Quelques règles pour cette fois-ci : essayer de prendre plus de surface dans le cadre, trouver du volume, aller radicalement dans l’abstraction (aplat de couleurs, partir dans les lignes, la forme, la construction…) Le métal rajoute un côté mécanique, possibilité de laisser le revers du papier, mettre de la tension, laisser aller le mouvement. On peut déchirer la matière avec les doigts et pas seulement avec le ciseau. Dans sa réalisation elle récupère de la matière pour la remettre dans une autre forme comme un modelage/remodelage. Dans la dernière partie, elle fait apparaître dans la déstructuration une reconstruction. On constate qu'on reste dans un rapport frontal, je lui reproche de ne pas prendre d'espace dans le cadre. Cette notion d'abstraction amène un réel changement dans la globalité de la séance.

Portrait = séance 4 / 21 janvier 2013

Suite au dispositif proposé la séance d’avant Nina me propose plusieurs images : celle d’une sculpture de Bojan Sarcevic ou elle aimerait bien fabriquer une sculpture à part entière de représentation. Aussi elle me montre plusieurs images de Jean-Dubuffet, ou elle me parle d’inspiration d’Art Brut. Tout d’un coup le projet prend tout son sens : par son titre séance, ou tout est apparu par une naïveté organique que la matière à proposer Nina, aussi par son application spontanée « L’art ne vient pas coucher dans les lits qu’on a faits pour lui ; il se sauve aussitôt qu’on prononce son nom : ce qu’il aime c’est l’incognito. Ses meilleurs moments sont quand il oublie comment il s’appelle. » — Jean Dubuffet. Pour cette séance-ci le mot d’ordre : la Sculpture. Il nous faut trouver plusieurs formes évolutives qui s’élaborent. On décide de commencer par travailler sur l’arrière plan, et puis se dresse hors de cet arrière-plan une avancée (Bas-relief) d’une figure hors du plan. Petit à petit par la forme de base installée on crée des formes quasis complètes (en ce qui concerne leur volume), mais elles restent attachées au fond. Nous incisons dans l’épaisseur de la surface afin de créer du relief, du volume, de l’épaisseur. Nous faisons apparaitre la matière carton, le but étant d’arriver à une forme « RondeBosse » afin que notre surface plane puisse dans son évolution être observé de tous côté. Nous jouons avec les deux principes d’exécutions ou nous faisons émerger la forme mais complète. En effet, la superposition des figures, on le voit, intimement lié à celui du temps et de la mémoire. La démarche impose un rythme propre, quotidien et finalement, assez lent. En première partie on peut constater un premier contact avec la matière ou nous pouvons créer une déformation du visage. L’apparition de la matière au visage créer un masque dans une même composition.

Portrait = séance 5 / 28 janvier 2013

Apparition de la ligne tige, branchage, et ligne du scotch. Création de nouvelles couleurs que nous avons créés nous-même sur du papier plastique transparent. Par sa pratique Nina arrive à créer du volume en réaction directe avec la matière. On peut la voir agir à travers un savoir-faire, de comment placer ses mains pour créer des angles, la ligne, le découpage, le volume… Ses mains sont l’action directe d’une pratique. A travers la construction on peut faire apparaitre d’autres compositions, exemple : « - Quand Nina avec le scotch jaune dessine sur la toile blanche une trace jaune. » c’est au photographe d’attraper ça. Idem quand je vois qu’elle cherche à comment faire intervenir un rouleau pour choisir sa couleur. Je constate que je perds mon attention en observant le démarrage. Le démarrage doit avoir beaucoup plus d’impact dans le recouvrement afin de créer une évolution plus radical, ce qui ne se passe pas par la suite. . Créer des changements radicaux. Notre enjeu c’est la surface, il faut qu’on prenne la surface de la toile. C’est magique d’observer à travers le déchirement, Nina arrive à repositionner la matière en recréant une nouvelle forme. A la fin de la séance Nina me reproche que mon cadre est trop serré, qu’il faut avoir plus de « toile blanche » pour laisser la ligne ne pas sortir systématiquement hors du cadre. On doit vraiment penser en surface et en volume.

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